Mémoire infantile : comment notre cerveau efface nos souvenirs de bébés
Actualité publiée dans "Santé et enfance" le 19/05/2014
Les souvenirs de notre petite enfance, absents avant 2-3 ans et relativement rares avant 6-7 ans, seraient en fait supprimés lors de la formation de nouveaux neurones. Pour les scientifiques il pourrait s’agir d’un mécanisme nécessaire pour le développement de l’enfant, son apprentissage et la création de nouveaux souvenirs.
Les souvenirs d’enfance naturellement effacés
Plusieurs hypothèses scientifiques ont été formulées pour expliquer le processus d’amnésie infantile. Selon de nouvelles recherches, le fait de ne pas pouvoir se souvenir de nos premières années serait lié au développement de nouveaux neurones.
Pour l’équipe de chercheurs canadiens, il s’agirait d’une sorte de reconfiguration, de réorganisation des « circuits de la mémoire ». Les très vieux souvenirs pourraient créer des interférences avec la création de nouveaux souvenirs et les phases d’apprentissage de l’enfant. En disparaissant, ses « vieux » souvenirs laisseraient donc de la place à de nouvelles connaissances, accordant ainsi au cerveau une plus grande capacité d’apprentissage, fondamentale chez le jeune enfant.
Pour mettre en évidence ce phénomène, les chercheurs ont travaillé sur de jeunes souris. En associant certains endroits à des petits chocs électriques, les chercheurs ont pu créer des souvenirs facilement repérables. Les scientifiques ont ensuite joué sur la neurogénèse, c’est-à-dire le processus de formation des neurones, en l’accélérant ou le ralentissant.
Dans le cas où le processus de neurogénèse est accéléré, les souris ont plus tendance à retourner aux endroits associés auparavant aux chocs électriques, autrement dit elles se souviennent moins, que dans le cas ou la neurogénèse est ralentie.
D’autres hypothèses pour expliquer l’amnésie infantile
Si l’hypothèse du « remplacement » d’anciens souvenirs, par de nouveaux pour permettre à l’enfant d’apprendre et de grandir, n’est pas vérifiée ; elle rajoute néanmoins une nouvelle piste dans la compréhension des mécanismes de développement de l’enfant.
En parallèle d’autres hypothèses subsistent quant à cette amnésie infantile. Pour certains spécialistes, l’amnésie infantile pourrait être liée à l’apprentissage du langage. Dans cette hypothèse, le fait de pouvoir raconter ces souvenirs agirait comme une sorte d’ancre à la mémoire. En d’autres termes si l’enfant n’est pas capable de mettre des mots sur ses souvenirs, il risque de les oublier.
Une autre hypothèse beaucoup plus théorique a été émise par le très célèbre neurologue et psychanalyste autrichien, Sigmund Freud. Selon lui, cette perte de mémoire serait un réflexe psychologique, un mécanisme de refoulement de l’individu.
L’étude complète est publiée dans la revue Science du 9 mai 2014 et peut être téléchargée en anglais sur le site www.sciencemag.org.